mardi 28 novembre 2006

Moudi, Berlin, Lulu

- Mais... mais t'es blonde en fait !
- Naaaaaaan, c'est des mèches euh !!

- Oh ! Aeroflot ! Je suis allé au Japon avec ce truc...
- La prochaine fois, tu prendras Air Cameroun ?

- C'est quoi, ça ?
- Ben, ça doit représenter un dieu.
- Ça date de quand ?
- Ben, c'est marqué, là...
- Ah ouais tiens.

- Aaaah me pousse pas dans l'escalator ! Déjà la rampe qui va plus vite que moi ça me perturbe ! Et j'ai peur de me prendre les pieds à la fin !
- Ah, moi aussi j'avais peur de ça quand j'étais petit.
- Tu vois ?
- Quand j'étais petit, hein.

- Tu veux un sandwich, Lulu ?
- J'ai pas faim.
- Tu veux un gateau au chocolat Lulu ?
- Je te dis que j'ai pas faim.
- On va au resto ce soir, Lulu ?
- J'aurai toujours pas faim.
- On s'achète un donut, Lulu ?
- Heu... d'accord.

- Lulu ! Calin !
- Naaaaaaan !!

- Et ça, ça vient d'où ?
- Euh.....
*gros blanc*
Sumérien... ?

- T'es sûre de bosser dans ce musée ?

- En fait, pour toi, la vie est divisée entre les trucs que t'aimes pas et les trucs qui te perturbent, non ?
- Y'a aussi des trucs que j'aime !
- Comme ?
- Norbert Elias !
- ... ?

- Je peux te prendre en photo avec le bout de mur, là ?
- *groumpf*
- Euh, d'accord...

- Et là comme ça, ta page elle s'ouvrira dans un nouvel onglet, tu vois ?
- Ok !
- Qu'est-ce qu'on dit ?
- Merchi Moudi !
- ... *rougit*


Merci pour tout, Lulu.

samedi 18 novembre 2006

Julie, Benjamin, le camion, l'amour

Chapitre 33

- Si je calcule bien, dis-je, Liesl et le vieux Job se sont offerts dans les quatre-vingts années de vie commune, c'est ça ?
- Quatre-vingt-sept années exactement. Ils ne se sont plus quittés depuis cette rencontre, au café central.
Nous avons vidé le lac d'Annecy avec nos petits verres. Le grand camion blanc tanguait sur la route de Grenoble.
- La belle amour, dis-je.
Le camion blanc fit un écart nerveux.
- L'amour, toujours l'amour, tu nous pompes l'air avec ton amour, Benjamin !
(Ouh là... humeur)
Mains crispées sur le volant, regard-horizon, Julie s'était mise à conduire comme on s'acharne.
- Tu me donnerais presque envie de repiquer au cul pour le cul.
Ecrasement du champignon. Bond de la bête blanche. Je me suis tenu à la poingnée de la portière et au sujet de la conversation.
- Ah ! bon, quatre-vingt-sept années de vie commune sans amour, alors ?
Hurlement des virages.
- Le monde selon Malaussène : avec ou sans amour ! Pas d'alternative. Le devoir d'amour ! L'obligation au bonheur ! La garantie-félicité ! L'autre dans le blanc des yeux ! Un univers de merlans frits ! Je t'aime tu m'aimes, qu'est-ce qu'on va faire de tout cet amour ? La nausée ! De quoi s'enrôler dans la horde des veuveurs !
- Les veuveurs ?
- Les veuveurs ! Les faiseurs de veuves ! Qui nous libèrent de l'amour ! Pour donner une chance à la vie ! Telle qu'elle est ! Pas aimable !
J'ai regardé le ciel. Pas le moindre nuage. Une colère bleue.
- D'où ça te vient, cette religion de l'amour, Benjamin ? Où est-ce que tu l'as chopée, cette vérole rose ? Petits cœurs qui puent la fleur ! Ce que tu appelles l'amour... au mieux, des appétits ! Au pis, des habitudes ! Dans tous les cas, une mise en scène ! De l'imposture de la séduction jusqu'aux mensonges de la rupture, en passant par les regrets inexprimés et les remords inavouables, rien que des rôles de composition ! De la trouille, des combines, des recettes, la voilà la belle amour ! Cette sale cuisine pour oublier ce qu'on est ! Et remettre la table tous les jours ! Tu nous emmerdes, Malaussène, avec l'amour ! Change tes yeux ! Ouvre la fenêtre ! Offre-toi une télé ! Lis le journal ! Apprends la statistique ! Entre en politique ! Travaille ! Et tu nous reparleras de la belle amour !
Je l'écoute. Je l'écoute. Le ciel est bleu. Le moteur s'est emballé. Je suis loin de Paris. En voyage. Prisonnier de l'extérieur. Pas de siège éjectable.
Elle s'est mise à grommeler, en espagnol :
- No se puede vivir sin amar...
Elle ricane. Elle tape sur le volant. A pleines paumes. Pied au plancher, elle gueule :
- No se puede vivir sin amar ! Ah ! Ah !
Un vrai cri de guerre.
Le camion pique à droite, fait une embardée sur un promontoire de terre brune. Poussière. Frein à main. Pare-brise. Immobilité. A une roue du précipice. Souffle court.
Elle ouvre la porte. Elle saute. Elle se découpe sur fond de vallée bossue. Elle shoote dans un caillou. Le silence tombe, tombe.
Tombe.
Elle s'accroupit au-dessus du vide.
Eternité.
Elle se relève.
Le ciel sur les épaules. Les bras le long du corps. Ses yeux à ses pieds.
Elle souffle un bon coup.
Elle se retourne.
Elle remonte sur son siège.
Elle dit :
- Excuse-moi.
Elle ne me regarde pas. Ne me touche pas.
Contact.
- C'est passé.
Elle répète :
- Excuse-moi.
Marche arrière.
Le camion blanc reprend la route.

Daniel Pennac, Monsieur Mallaussène


Conclusion : les gonzesses, quand ça gueule, yaka la boucler :'D

(conclusion provisoire, je finirai cet article plus tard ^^)

Edith du lendemain, même heure : il est tard, j'ai envie de dormir, et de toutes façons j'ai pas encore reçu assez d'insultes pour ma conclusion :'( donc demain la suite !!

Edith de très beaucoup de jours après : apparemment ma conclusion provisoire n'a pas déplu à tout le monde, étonnant (note pour moi-même > essayer les blagues racistes la prochaine fois)
hum... j'ai toujours autant de choses à dire sur cet extrait, que ça me décourage...vraiment...
je vous dirai donc simplement de lire, lire, et relire ces quelques mots, apprécier le rythme très précis des phrases, l'alternance dialogue/sentiments intérieurs/décor, sentir, ressentir la violence de la colère de Julie, la tension dans l'air, l'attitude ambigüe de Benjamin (il évite le débat ? il sait que le dialogue est impossible ? il l'écoute au moins ? Il n'est pas révolté d'être ainsi rabbaissé ?), et puis... juste réfléchir... a-t-on encore le droit d'être innocent à mon âge ? de croire en l'amour ? un couple, c'est de la résignation, des compromis, de la saloperie refoulée, une mise en scène ?

C'est tout de même terrible... aimer quelqu'un parce qu'on ne trouve rien d'autre... rester avec parce qu'on a peur d'être seul... et continuer... et continuer... et continuer... se mentir... attendre... perdre la force... perdre la patience... perdre la foi... se détruire... petit à petit... et mourir.

C'est ça qui m'attend ?

Mais même si c'est ça qui m'attend... pourquoi devrait-on toujours voir les choses en face ? allumer la télé, et se dire qu'on est dans la merde ?
C'est ça, sans doute, le silence de Benjamin. "Oui, il existe des millions de raisons qui nous font dire que l'amour n'est qu'un tas de mensonges et de faux-semblants... mais j'y crois."
Et la colère de Julie, c'est quoi finalement ? La frustration de ne pas avoir autant la foi ? ou plutôt, de trop en savoir pour y croire ? mais... Benjamin, il n'aurait pas besoin d'aller très loin pour trouver de quoi bousiller sa belle théorie de l'amour, c'est loin d'être un imbécile heureux ou un inculte total. Donc... la fin du passage, est-ce bien une résignation de Julie face à aux faux-semblants de son couple à elle ? (elle n'est pas du genre à se laisser avoir comme Job et Liesl - l'exemple-type apparemment de ce qu'elle dénonce) ne serait-ce pas plutôt une intégration progressive (et difficile) de la religion de Benjamin ? l'amour de Benjamin qui l'envahit, la rassure, la calme, malgré son besoin d'indépendance, malgré son prosaïsme...

En tout cas... le monde selon Moudi, ce sera avec amour, définitivement.
Je serai un vrai Benjamin, borné, obtus même, tant il est vrai que l'Amour est la seule religion qui pour moi mérite un peu d'intolérance, d'intransigeance...

Bon, et dans tout ça, elle est où ma Julie ? ("^o^)

vendredi 17 novembre 2006

Les proverbes chinois

Si tu n'as pas ce que tu aimes, aime ce que tu as...

Voilà la signature d'un jeune homme, sur un forum.

Bon.

On pourrait discuter un peu de la portée philosophique de cet aphorisme (avec lequel je suis tout à fait d'accord, hein) mais... en fait c'est juste la forme qui m'intéresse :)
En ce moment, enfin depuis un moment... on voit ça partout... dans tous les blogs, toutes les signatures de forum, tous les agendas de collégiens, de lycéens, de licencieux (un bonbon pour le premier à me donner le sens "propre" de ce mot ^^), de mastérisoirs, de doctorants, pis les plus vieux...

Ce n'est pas toi qui lit le bouquin, c'est le bouquin qui te lit.

Quand la chicorée du matin réveille ton cerveau, c'est ton cerveau qui réveille la chicorée du matin.

(pourquoi je pense à ça à 4h du mat', moi ? -__-)

Très franchement ça me fascine.
Pas que ce soit particulièrement profond, hein, on fait le tour de chaque en 30 secondes montre en main.
Mais, dès que ça sort, ben, ça claque. :D ça fait euh... inspiré. Comme si ça venait d'on ne sait trop quel texte sacré !
Alors que bon... la formule c'est :
[nom 1][verbe][nom 2], [nom 2][verbe][nom 1] (articulé avec, au choix, une addition, une négation, une condition...)

Finalement, en y réfléchissant, je me rends compte que la religion du bon mot, de l'esbrouffe, du truc qui tape droit dans le neurone, est intrinsèquement liée à une société de l'image, de la publicité, de l'émotion directe et brutale... ça tape fort, mais après... il y a quoi ? on a une phrase, voilà, qui est très jolie, qui est visuelle aussi, avec ce parallélisme inversé dans les mots, et on croit ainsi avoir résumé en une phrase une thèse de 300 pages... mais non !! ça fait pas réfléchir !! "Je pense donc je suis" ça fait réfléchir, ça n'a rien d'immédiat, c'est des dizaines d'autres conclusions avant d'arriver à cette foutue phrase, que tout le monde comprend sans comprendre... Le machin dont je parle dans cet article, ça relie deux neurones entre eux, on se dit "ooooh" et puis... et puis... rien... on croit avoir découvert un truc qui, soit relève de l'évidence la plus flagrante, soit ne déterre qu'un lieu commun (déjà formulé dans un ou deux proverbes grand-maternels), soit ne va pas plus loin que [nom 1][verbe][nom 2], [nom 2][verbe][nom 1]. Eh oui.


Donc voilà, pour ce blog de citation, je pensais qu'il était intéressant de parler de ces belles coquilles vides... je me contenterai donc d'une citation de circonstance, de Friedrich Nietzsche, excusez du peu (je le savais que j'allais me la péter dans ce blog avec des citations que même moi je comprends pas "^^) :

Si tu plonges longtemps ton regard dans l'abîme, l'abîme te regarde aussi.

et sur ce, je vais me réfugier dans l'abîme du dodo, bien moins fatigante et déprimante que l'abîme internettienne... ^^

mercredi 15 novembre 2006

Monsieur Rocher *défaille*

Au fil des années à l'époque Heian, la figure du "Dom Juan" à la japonaise évolue énormément dans les monogatari [romans]. Il passe du héros romantique moyen-âgeux, dans l'Ochikubo Monogatari, à une sorte de poête aristocrate, charmeur exceptionnel dans le Genji Monogatari, puis à une figure totalement grotesque dans le Konjaku, dans lequel certaines anecdotes ridiculisent énormément le personnage... Pour le plus grand plaisir de tous les moines bouddhistes qui montraient là la vacuité totale de ce comportement à travers différents sûtras en forme de morale, à la fin des textes.

Et toc.

Monsieur Rocher, éminent professeur de l'université Bordeaux III



Comment dire... Monsieur Rocher a donné sens à ce qu'on appelle au Japon Ningenkokuhô, littéralement "Trésor national vivant". Quand Monsieur Rocher parle, les élèves se taisent. Quand Monsieur Rocher ne parle pas, les élèves se taisent autant, et souffrent en silence, en attendant que Monsieur Rocher parle.
Et quand Monsieur Rocher sous-entend au détour d'une phrase magnifiquement tournée (dont je suis malheureusement incapable de donner une retranscription fidèle), qu'il se moque très légèrement d'un personnage, les élèves rient :D
Ce "et toc" restera à jamais gravé dans nos mémoires !!!

(bon ok, une personne qui n'a pas connu Monsieur Rocher ne peut pas comprendre X'D )

Les kanji, le gros mâle, l'amour

('tention, on innove déjà avec une citation imagée !)

Vous n'êtes sans doute pas sans savoir que je fais des études de japonologie... Ainsi, aujourd'hui, comme je devrais faire plus souvent "^^, j'ai bossé mes kanji, c-à-d les caractères chinois super chiants à écrire car plein de traits partout, super chiants à déchiffrer car ils se ressemblent tous, super chiants à lire car plusieurs lectures différentes pour chaque (vous êtes prévenus).

Et comme à chaque fois que je bosse mes kanjis, je découvre plein de trucs trop, mais alors trop cools ^^. Quand on fait des études, de n'importe quelle sorte, c'est le genre de petit truc, de petit plaisir qu'on sait être les seuls à partager avec tous les autres demeurés qui ont choisi la même filière de demeuré (parce que de toutes façons, pour passer plus d'un an à étudier n'importe quelle discipline universitaire et pour aimer ça, il faut être demeuré). Mais bon, comme c'est mon blog, et que je fais ce que je veux, voici deux petites choses rigolotes qui m'ont interpellé pendant cette heure d'intense réflexion (avec du Billy Talent dans les oreilles pour que ça passe mieux, hihi)


1) Taiyô, messire :)


(click it !!!)


Voilà, le mot soleil, taiyô, est composé de ces deux caractères, qui veulent dire respectivement "gros" et... "mâle".
Le soleil est un gros mâle.
Personnellement, c'est une vision qui me choque "^^. Y'a un gros monsieur, que j'imagine assez bonhomme le monsieur hein, du genre ventre à bière à regarder télé foot le dimanche aprèm tant qu'à faire, mais cool, qui nous mate de tout là-haut, et nous illumine de sa Grande Lumière... ok... pourquoi pas...

(en y réfléchissant, avec le sens "positif" donné à je me demande s'il ne s'agit pas là d'une japonisation du concept du yin/yang... le yang étant le symbole masculin, caractéristique du soleil, et positif donc, contrairement au yin féminin de la lune... mouais... enfin ça fait trop androcentriste quand même :P *va invoquer la déesse Lulu pour avoir son avis sur la question* )

le deuxième commence par une bourde de ma part...


2 ) Déclinaison de l'amour


(click it !!!)


Voilà. Alors je devais écrire le premier caractère, Hen, de tête. Hen veut dire, en gros, "bizarre"... et on le retrouve dans Hentai, qui veut dire "déviant" ou plus précisément désigne tout ce qui concerne la pornographie.
Et quand je me mets à l'écrire... v'là t'y pas que la première graphie qui m'apparaît à l'esprit est le deuxième caractère de l'image... Koi...
Le plus troublant dans l'histoire est que Koi n'est pas anodin, il désigne l'amour passionné, l'amour passionnel, voire physique, par opposition à Ai, caractère d'en dessous, qui désigne l'amour platonique, le "bel amour"...

Après avoir réfléchi quelques secondes à ce qui a bien faire dévier ma pensée de la pornographie vers l'amour fougueux (l'inverse aurait-il été plus inquiétant ? "^^), je regarde dans mon dico de kanji et... Incroyable, ces trois termes ont été placés à la suite, dans cet ordre ! "déviance, passion, amour"
Peut-on imaginer ce qui a pu passer par la tête des éminents spécialistes japonais sur la question, quand ils ont fait la liste des 1945 caractères indispensables à la compréhension de la langue écrite nippone, et qu'ils ont mis ces trois caractères DANS CETTE ORDRE.

Mais en y regardant de plus près... Hen et Koi (déviance et passion) sont très proches, effectivement. En haut de ces caractères, nous avons un feu (les quatre petits traits) qui couve sous une sorte de toit... un feu dévorant à l'intérieur du corps ? Voilà une interprétation intéressante... Quand à la "clé" du bas, elle n'a pas de signification particulière pour Hen, toutefois pour Koi, c'est tout de même la clé du cœur... La passion n'est-elle donc qu'une excentricité du coeur ? :)

Quant à Ai... C'est un cœur, sous un toit... avec la clé de la "griffe" par-dessus... Un cœur bien difficile à capturer, donc ^^

NB 1 : à noter, le Ren'ai, qui est en fait une association de Koi et Ai... et désigne l'amour, tout simplement, une association des deux pendants du terme, car on ne vit pas que de passion, car on ne vit pas que d'amour platonique...

NB 2 : Aidoku, l'amour de la lecture xD. Hein Alex ^^

(Suite logique du post précédent...)

Espérer n'efface pas tous les problèmes, mais ça aide.

Ouain, merci de l'avoir dit par toi-même...


(haha ! un jour vous saurez à qui ce post est adressé...)

lundi 13 novembre 2006

Les survivants, l'ordre des choses, l'espoir

Et j'ai brusquement senti entre mes doigts le froid mortel de la photo arrachée aux mains de Clément, froide comme la peau d'un mort, froide comme l'absence de Cissou, et dans la chaleur de notre lit commun, j'ai compris qu'avec le départ de Cissou nous avions perdu une autre raison de vivre, qu'après l'oncle Stojil et le vieux Thian, Cissou avait levé l'ancre à son tour, Cissou que je n'avais pas pleuré sur le moment, levé l'ancre, arraché une de mes attaches au monde, car ce n'était pas un ami que j'avais perdu là, c'était la meilleure part de moi-même, comme toujours quand un ami s'en va, une ancre arrachée au cœur de mon être, un morceau de mon cœur sanglant au bout de cette ancre enlevée, et ce n'était pas du vin qui coulait de mes yeux, c'étaient les larmes de mes larmes, cette inépuisable cuvée de souffrance, le cépage si productif de la douleur de vivre, si profondément enraciné en notre terre de deuil.
J'ai sangloté dans les bras de Julie, et Julie s'y est mise à son tour, on s'est vidés jusqu'à cette sorte d'évanouissement qu'on appelle le sommeil, ce répit dont on se réveille avec un enfant perdu, un ami en moins, une guerre en plus, et tout le reste de la route à faire malgré tout, car il paraît que nous aussi nous somme des raisons de vivre, qu'il ne faut pas ajouter le départ au départ, que le suicide est fatal au cœur des survivants, qu'il faut s'accrocher, s'accrocher quand même, s'accrocher avec les ongles, s'accrocher avec les dents.

Daniel Pennac, Monsieur Malaussène

Oui je sais, je commence fort... Mais c'est un peu ce passage qui m'a poussé à créer ce blog "^^. Celui-ci, et tous les autres fois où je me suis dis "ptainnnn c'est trop beauuuuu !", mais surtout celui-ci, parce que je l'ai lu hier, dans la cuisine de mon "village" universitaire, et que je retenais mes larmes tellement c'était beau... Et j'avais simplement envie d'appeler ma lectrice préférée et de lui dire "Alexxxxx c'est trop beauuuuuu !!!" (elle au moins, je sais qu'elle connait ce sentiment "^^)... et... plutôt que de le dire à elle seulement, pis de l'oublier le lendemain, j'ai pensé à ce blog...

Pour revenir au texte lui-même, que dire... C'est du Pennac triste... le Pennac drôle est génial, le Pennac glauque est génial, mais le Pennac triste... ouch ^^
J'ose à peine commenter ce texte... l'utilisation des images chez Pennac est très intéressante, je trouve, car elles marquent beaucoup par leur force, parfois leur incongruité (dans les passages drôles, donc une bonne partie des bouquins, ça peut balancer sévère ^^) ou comme ici par une justesse de ton incroyable ; les images se filent et se défilent, s'enchaînent et s'entremèlent, une ancre s'arrache d'un verger ensanglanté, où la vie a planté là les graines de la souffrance... y'a rien à rajouter, tant l'art de Pennac est EVIDENT. Et cette phrase qui n'en finit plus de finir, à la conclusion si cruelle... La vie chez les Malaussène et leur entourage est d'une cruauté terrible, et ils conservent d'un tome à un autre les cicatrices que les "ogres" de toutes sortes leur ont infligé, le meilleur exemple étant le chien Julius, épileptique à l'occasion, paralysé d'une patte (il me semble), affligé maintenant d'un toc relativement dangereux (il mord dans le vide (enfin, avec de la chance dans le vide) toutes les trois minutes).
Ils vivent et ils s'accrochent, en retrouvant à chaque fois de nouveaux alliés, plus ou moins fiables certes, en grandissant, plus ou moins dans le bon sens certes, et en se reproduisant, bien sûr ! Chaque enfant a un vieux, qui lui raconte une histoire ou le protège avec un Manhurin chargé à bloc, au choix ; et chaque vieux est suivi d'un enfant, qui hérite parfois de son nom (avec plus ou moins de bonheur quand le vieux est surnommé comme une bataille qui fit 300 000 morts).
"Un vieux meurt, une enfant survit, c'est dans l'ordre des choses" est la triste devise du vieil inspecteur de Sin City...
Et c'est ça l'espoir, chez les Malaussène, la tribu la plus vivante de la littérature contemporaine (dans ce que je connais "^^), et c'est ça que je voulais montrer avec cet extrait qui pourtant, n'est pas le plus joyeux du bouquin...

Moudi, le blog à Moudi, les parenthèses à Moudi

Hum... ce blog n'est qu'un blog parmi d'autres blogs à moi... et le simple fait de les consacrer aux bouquins me parait infiniment prétentieux étant donné ma capacité de lecture, mais bref. (oui, d'ailleurs pour la peine je ne parlerai que de bouquins, c'est le premier et dernier post où je parlerai de "livres"... ah bah ça y est c'est fait, je l'ai dit, je le répèterai plus ^^)
donc, dans ce petit espace intime (intimiste plutôt ?), je me bornerai (oui je suis très borné... bref) à citer (ce qui veut dire recopier... aïe...) des passages (très courts, très longs, n'importe) de textes (toutes sortes de texte, et même pas forcément des textes, quand j'y pense ^^) qui m'auront (ou qui m'ont, j'ai lu quelques trucs déjà "^^) marqué (par leur intelligence, leur vacuité, leur émotion, que sais-je encore ?) ou pas (la bonne blague, j'ai que ça à foutre...) et que je (enfin je... vous pourrez dire des trucs aussi hein) commenterai (ou pas, j'ai une vie très remplie... nan je déconne, j'ai la flemme aussi) par un (ou des, confrontons les points de vue ^^) avis (arg... rien à mettre pour remplir cette parenthèse T_T) succint (ou pas, je suis fainéant mais très blatérant quand je veux... oui c'est logique) et potentiellement (soyons prudent) intéressant (pas de commentaire pour cette parenthèse, ce serait trop facile de m'auto-casser, ça vaut pas le coup "^^).

bon, pour ceux qui ont suivi... je commencerai bien sûr avec MA lecture en cours, celle qui ponctue chaque instant ou presque de ma vie, quand je ne suis pas en cours (...) ou sur msn -re (...)-, qui me réveille la nuit, en sueur, avec des yeux de hamster amphétaminé sous hypnose, toussa toussa... je parle donc de Monsieur Malaussène de Daniel Pennac ^^